Les religions ont, en général, une vision négative de l’homosexualité. Elles la condamnent, comme toute pratique sexuelle qui n’aurait pas pour but de donner naissance à un enfant dans le cadre strict du mariage. Pour les religions les moins sévères sur le sujet (certaines formes de bouddhisme, par exemple), cela a pu se limiter à la condamnation d’un comportement contraire à la recherche spirituelle. Mais le rejet de certains actes — qualifiés aujourd’hui d’homosexuels — a été, pendant des siècles, un principe commun au judaïsme, aux différentes églises chrétiennes et à l’islam, avec des répercussions variables selon les époques, les milieux et les sociétés.
Un peu d’histoire…
Le judaïsme, très anciennement hostile aux relations entre hommes, a transformé peu à peu des peines très strictes (lapidation) en mesures d’éloignement ou d’exclusion de la communauté (bien avant l’ère chrétienne). Longtemps religion de groupes minoritaires et dominés qui ne disposaient pas du pouvoir politique, le judaïsme a entretenu une forte hostilité à l’égard des relations entre personnes de même sexe, sans jamais en faire une question importante.
C’est l’Europe chrétienne de la fin du Moyen-âge (XIIIe – XIVe siècles) qui a transformé la condamnation spirituelle en persécution et inventé la figure du « sodomite ». Durant l’Inquisition (XVe – XVIIe siècle), l’accusation de « péché contre nature » donnait lieu à des procès accompagnés par la torture et se concluant souvent par la mort des condamnés. Cependant, les procédures étaient peu fréquentes : les individus protégés par les pouvoirs politiques ou religieux n’étaient jamais inquiétés. À partir du XIXe siècle, la condamnation a pris une tournure moins brutale, tout en restant très stricte. En revanche, des voix nouvelles (médecins, psychologues, moralistes) ont introduit d’autres conceptions de l’homosexualité, entamant le monopole de jugement de l’Eglise sur le sujet.
L’évolution récente au sein du christianisme fait aujourd’hui la différence entre la personne (le « pêcheur ») à qui est accordée la compassion — à condition qu’il/elle s’abstienne de rapports sexuels « contre nature » ou « désordonnés » —, et l’acte qui demeure très mal vu, voire condamné (comme pêché), en particulier dans le catholicisme, l’orthodoxie et certaines formes de protestantisme.
Dans les pays musulmans, l’application de la charia (un recueil de traditions particulièrement rigoureux, postérieur au Coran) a beaucoup évolué selon les époques et les sociétés. En matière d’homosexualité, la charia préconise la condamnation à mort pour les relations génitales entre hommes. De moins en moins appliquée jusqu’au XIXe siècle et la naissance du fondamentalisme* sunnite (ou wahhabisme), elle a connu ensuite un renouveau. Elle s’impose surtout depuis quelques décennies. Elle est beaucoup invoquée dans l’Iran chiite, certains pays du Golfe Persique (sunnites) et quelques pays d’Afrique (Soudan, Nigéria), qui associent homosexualité et perversion occidentale. Elle vient justifier dans ces pays une forte intolérance à l’égard des personnes LGBT.
Sur quelles bases cette homophobie prétend-elle se fonder ?
La condamnation religieuse de ce que nous appelons de nos jours « homosexualité » est fondée sur des passages, au demeurant peu nombreux et très brefs, de certains textes sacrés : une condamnation des rapports entre hommes dans le Lévitique (Ancien Testament), la mention des femmes et des hommes se livrant à « des rapports contre nature » parmi les comportements dénoncés par l’apôtre Paul dans deux épîtres (lettres) du Nouveau Testament, des interdictions proches du Lévitique dans certaines sourates du Coran. Ces évocations très brèves ont ensuite été développées par des interprétations postérieures, ou alors elles ont pu rencontrer une tradition très répressive (dans la Perse d’avant l’Islam par exemple, dont l’Iran d’aujourd’hui est comme l’héritière). Or ces traditions ont tiré dans un sens punitif des passages de livres sacrés qu’on pouvait lire autrement, ne serait-ce qu’en utilisant d’autres passages des mêmes textes.
C’est du reste l’ensemble des pratiques sexuelles sortant de la relation conjugale que les religions ont réprimé — relations hors mariage, adultère, masturbation parfois : pour les grands courants religieux, la sexualité n’est pas une pulsion libre, elle doit être strictement encadrée et contrôlée.
Concilier homosexualité et foi, c’est possible
De nombreux actes passibles de la mort dans l’Ancien Testament (insulter ses parents, pratiquer la divination, avoir des relations sexuelles avec des épouses de son père…) ont été depuis retirés de la liste des comportements gravement proscrits, alors que la condamnation des relations entre hommes est restée. Dans les Évangiles, si l’adultère et le divorce occupent une place significative, il n’y a aucune évocation de ce que nous appellerions « homosexualité ». Et les prescriptions et les thèses figurant dans les Épîtres de Paul n’ont pas cessé d’être discutées par les multiples traditions chrétiennes : on peut les interpréter de différentes manières.
Des homosexuels et d’autres croyants, souvent en dehors de leurs autorités religieuses, proposent depuis plusieurs années une nouvelle lecture des textes sacrés et de la tradition, afin de montrer qu’il est possible de concilier sa foi et son orientation sexuelle. Aujourd’hui, certaines Églises protestantes ou groupes de croyants dans les autres religions acceptent en leur sein les personnes LGBT, et militent pour une évolution majeure en matière de perception de la sexualité par la religion.
Pour les trois principales religions dans notre culture, des associations peuvent aider à répondre aux questions que se posent les personnes LGBT et les aider à vivre plus sereinement ce voisinage entre leur croyance et leur orientation sexuelle (ou leur transidentité) :
- David et Jonathan pour les chrétiens ;
- HM2F : Homosexuels et Musulmans de France pour les musulmans ;
- Beit Haverim pour les juifs.